Je me souviens de la découverte du lieu de stage qui donnait à plein sur le site de Saint Bertrand de Comminges, enchâssé dans la montagne, tel un bijou qui scintillait dans la nuit,
Je me souviens de ma difficulté à m'adapter au travail d'écriture de poèmes, surtout dans un premier temps,
Je me souviens de mon questionnement par rapport au but de ce stage et de ce que j'allais en faire,
Je me souviens de mon intégration progressive dans le groupe et de sa cohésion qui s'est construite peu à peu,
Je me souviens des visites faites dans Saint Bertrand avec ce côté religieux qui attire et repousse à la fois,
Je me souviens de mon ressenti dans le village où tant de générations ont foulé les pavés usés et où l'on sent le poids du passé,
Je me souviens du travail fourni toute la semaine avec des temps de collage et de bricolage que je n'ai pas particulièrement appréciés,
Je me souviens de toutes les sortes de temps que nous avons eus et de notre séparation sous la neige, le dernier matin,
Je me souviens du dépaysement que m'a apporté cette semaine tout en étant à cinquante kilomètres de mon domicile,
Je me souviens également du formateur qui m'a fait découvrir ce que pouvait être un atelier d'écriture et ce pourquoi je continue à Moissac.
Je me souviens du lieu, du creux de verdure, de l'accueil.
Je me souviens des arbres fauchés, des pentes, du ciel, de Saint Bertrand le soir, illuminé.
Je me souviens du chat, du chien, des ruelles, des marches en groupe.
Je me souviens du cloître, de cette sensation de bien être, l'ambigüité délicieuse, et tout ce que cela m'inspire, me suggère : oppression-libération, fermeture-ouverture.
Je me souviens de la salle, du groupe de travail autour de la table, des échanges.
Je me souviens de la fatigue, et des questionnements : des exercices que je n'ai pas aimés et des interrogations pénibles.
Je me souviens des surprises heureuses, des mots donnés par le hasard.
Je me souviens d'une activité intense, d'un partage, du plaisir d'être en groupe
Je me souviens de rires, de Shopi, de macédoine, de neige.
- Je me souviens : lorsque nous sommes arrivés c'était un peu comme un jour de rentrée dans une nouvelle école (ou colo), entourés de personnes encore inconnues. Les petits groupes déjà formés par le covoiturage, les présentations un peu timides.
- Je me souviens : d'avoir aimé la beauté du paysage, d'avoir aimé me retrouver dans un cadre aussi paisible.
- Je me souviens de : je me souviens de la simplicité avec laquelle nous avons fait connaissance et le plaisir de travailler au sein d'un groupe qui se forme dans un esprit un peu colonie de vacances.
- Je me souviens des : veillées au coin du feu, des lectures à quinze voies.
- Je ne me souviens pas : non plus (comme M.Claude) du nom du village où nous avons fait les veillées, mais je me rappelle bien du Shopi et surtout que j'ai été très déçue en le voyant car je le voyais plus..., enfin moins..., enfin pas comme ça en tout cas. Je me souviens de l'avoir fantasmé ce Shopi à force d'en avoir entendu parler. Alors, j'ai été déçue forcément. Il était un peu quelconque finalement.
- Je ne me souviens plus : du temps qu'il faisait. Il devait faire froid. Je me souviens : de la neige toute cotonneuse.
- Je me souviens : d'une soirée diapos à huit dans une chambre, à boire du cidre tiède.
Je me souviens : du bruit des canalisations, la nuit et du vent qui sifflait dans les recoins, qui donnait l'impression de dormir dans une maison hantée. Mais comme je suis courageuse, je n'ai pas eu peur.
Je me souviens de cette énième visite à la cathédrale et de ma rencontre pour la première fois avec Marguerite à la Coque qu’il m’arrive dorénavant d’implorer dès que l’envie me prend d’en griller une.
Je me souviens du feu, du livre qui passait de main en main et de la ligne qui formait un cercle.
Je me souviens qu’il fallait jouer avec ça, ce quelque chose de soi, siège de notre regard, inconnu à nous même, ce quelque chose à découvrir sur lequel s’inscrivaient des rides d’écriture, notre visage.
Je me souviens du plaisir de découvrir les pierres, les sculptures où notre regard s’attardait.
Je me souviens du cercle que nous formions près de la cheminée pour accueillir le poème de Guillevic. Le livre passait dans chaque main, témoin de l’obstination du poète.
Je ne me souviens pas des attentes angoissantes, des moments de doutes, pour laisser venir les mots.
Je me souviens de la soirée où les apprentis écrivants se sont lancés fébrilement devant nous tous à lire leur essai, leur lettre sur la métamorphose.
Je me souviens du plaisir à me laisser emporter par les rires.
Je me souviens du blanc de neige du dernier jour qui nous éblouissait mais qui a pressé notre départ dans le risque, l’attirance de rester.
Je me souviens que je tourne toujours autour des mêmes sujets, les mêmes mots qui reviennent.
Je me souviens que j'écrivais déjà ces mots là avant d'aborder le stage.
Je me souviens de mon étonnement à découvrir cela, ces choses qui reviennent toujours.
Je me souviens ne pas savoir quoi écrire, une fois, et m'en servir pour faire une autre histoire.
Je me souviens que je croyais ne pas savoir vraiment écrire avant, ne pas avoir d'idées. En fait si.
Je me souviens ne pas savoir, jamais, où ça nous mène, et pourtant c'est là, au bout d'un moment. On arrive à quelque chose de concret.
Je me souviens la découverte.
Je me souviens d'une collecte de mots, j'aurai pu en faire des tonnes.
Je me souviens m'être dit que quand je rentrerai, je ferai ça et ça et tel exercice avec ce qu'il y a autour de chez moi. Je ne l'ai toujours pas fait.
Je me souviens que ça m'a fait du bien de me replonger dans un univers de création.
Je me souviens de cercles de lecture polyphonique.
Je me souviens Saint Bertrand de Comminges sous la neige.
Je me souviens d'une grande salle emplie de papiers volants, de ciseaux, de colle, et de l'agitation fébrile de chacun autour de son grand panneau à remplir.
Je me souviens de la difficulté d' écrire, du vide, du non sens.
Je me souviens des lectures tournantes, du son des voix qui se succèdent, qui se répondent.
Je me souviens de la montagne visage, d'un profil paysage.
Je me souviens des écritures autour d'une photographie de deux jeunes garçons qui jouent à la balle dans un carré de lumière.
Je me souviens de la tentative d'écrire avec des sels d'argent sur la page noire enlluminée d'étoiles.
Je me souviens de l'écriture et de la composition d'un livret sur une image noire et blanc très contrastée représentant des oiseaux sur des branches. Une vieille dame courbé par le poids des ans, et un chien rieur dans un coin de l'image.
Je me souviens des collectes de mots dans St Bertrand, de la recherche de mots à l'intérieur d'autres mots.