Une brise légère, un souffle divin, pourtant surplombée par tous les monstres de la création biblique, je me sens en sécurité sur les marches de pierres. Elles sont polies, lisses comme du marbre, douce comme de la peau. Toutes ces bêtes à l'aspect effrayant veillent. Sur nous, sur la ville. Peut-être sur rien du tout d'ailleurs? Bizarrement, ça a un côté rassurant.
-« Vous voulez qu'on échange? Vous voulez pas qu'on échange? »
-« Moi, j’aime bien ces petits personnages qui font des grimaces ! »
Il règne ici une paisibilité inhabituelle, une quiétude propice à la méditation. La chaleur sans être écrasante me plonge dans un état cotonneux. Ma demi surdité m’isole juste ce qui faut. Le serveur dit qu’il devient fou. Soi-disant par ces incessants aller retour pour nous servir nos boissons. Je m’étonne un peu, je pensais que cela faisait parti de sa fonction.
-« Tu as vu je commence à avoir mon attirail pour commencer à arrêter de fumer »
Le pot à l’envers se trouve place Durand Redon, le Graal aussi. Si Arthur Pendragon l’avait su, serait-il allé si loin ? Où alors, qu’importe le but du voyage, seul le chemin importe. Pourquoi regardent-ils tous en l’air ? Quand le sage montre le ciel, le fou regarde le doigt. C’est triste ! Ou peut-être juste prudent ? Tant pis pour la prudence!
-« de l’aide ? »
Je ne sais pas ! Je sais juste qu’elle ne viendra pas du ciel. Les lettres de la ville sont bien cachées. Comme le sont souvent les maux ! Ici, on ne distingue pas non plus les pansements. C’est bien fait finalement. Mais tout de même le pot à l’envers de la place Durand Redon. Peut-être que tout vient de là ?
Hop ! Cachées sous le pot les misères. Un petit coup de balai et ni vu ni connu. Je n’arrive pas à me résoudre à l’idée que ces monstres soient là par hasard. On ne montre pas impunément de telles atrocités. Avec le temps, on colmate, on panse et on ne voit plus rien. Ou presque. Les blessures, elles subsistent et deviennent intérieures. Un jour, elles peuvent ressurgir. Au moment où on s’y attend le moins. Finies, les dégustations nonchalantes de sorbet de chasselas aux terrasses des cafés.
-« Ici, c’est l’enfer !Ils se font dévorer par les serpents. Ils ont beau implorer Abraham, ils brûleront dans les flammes de l’enfer »